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léguées, et les nécessités mal formulées encore des temps nouveaux.

Marx et Blanqui croyaient tous deux à une prise de possession révolutionnaire du pouvoir par le prolétariat. Mais la pensée de Marx était beaucoup plus complexe. Sa méthode de révolution avait des aspects multiples. C’est donc chez Marx surtout que je veux la discuter. Or, toute entière et en quelque sens qu’on la prenne, elle est surannée. Elle procède ou d’hypothèses historiques épuisées, ou d’hypothèses économiques inexactes. D’abord, les souvenirs de la révolution française et des révolutions successives qui en furent, en France et en Europe, le prolongement, dominaient l’esprit de Marx. Le trait commun de tous les mouvements révolutionnaires, de 1789 à 1796, de 1830 à 1848, c’est qu’ils furent des mouvements révolutionnaires bourgeois auxquels la classe ouvrière se mêla pour les dépasser. Dans toute cette longue période, la classe ouvrière n’était pas assez forte pour tenter une révolution à son profit : elle n’était pas assez forte non plus pour prendre peu à peu, et selon la légalité nouvelle, la direction de la révolution. Mais elle pouvait faire et elle faisait deux choses. D’abord elle se mêlait à tous les mouvements révolutionnaires bourgeois pour y exercer et y accroître sa force ; elle profitait des périls que courait l’ordre