Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/302

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

trie crée et qui permettent aux ouvriers de localités différentes d’entrer en relations mutuelles. Or dès que cette union est faite, la multiplicité des luttes locales du même ordre se transforme en une lutte nationale unique, à direction centralisée, en une lutte de classe. Mais toute lutte de classe est une lutte politique. L’union que les bourgeois du moyen-âge quand ils ne disposaient que de chemins vicinaux, mirent des siècles à réaliser, les prolétaires modernes, grâce aux chemins de fer, la réalisent en peu d’années.

Cette organisation toutefois, qui crée une classe prolétarienne et, par suite, un parti politique prolétarien, à tout instant se brise à nouveau par la concurrence des ouvriers entre eux. Mais toujours aussi elle se redresse plus forte, plus ferme, plus puissante. En tirant parti des dissentiments internes de la bourgeoisie, elle parvient à faire reconnaître de force, et par la loi, quelques-uns des intérêts des travailleurs. Ainsi pour la loi sur la journée de dix heures en Angleterre. »

Si j’ai reproduit ce génial tableau du mouvement ouvrier moderne, ce n’est pas pour en discuter chaque trait : il y aurait en plusieurs points, et notamment sur le nivellement des salaires, bien des réserves à faire. Mais j’ai voulu que le lecteur pût se poser utilement la question que je me pose