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petits propriétaires ne sont pas supprimés par le machinisme comme les artisans. La machine agricole s’adapte en effet de plus en plus à la petite propriété, et bien loin de détruire le petit propriétaire, elle le dispense des frais de main-d’œuvre qu’il avait à supporter par exemple pour la moisson.

Le prolétariat rural devenant de plus en plus rare, la croissance de la grande propriété se trouve naturellement arrêtée. Et par là s’explique l’état à peu près stagnant de la propriété agricole en France.

Dans la remarquable étude qu’il a faite de la propriété rurale, Gabriel Deville concluait à un mouvement de concentration, mais lent et peu marqué. Bien des causes sembleraient devoir agir dans le sens de la grande propriété. Il est naturel, par exemple, que les capitalistes urbains soient tentés de consolider en terres une petite partie de leur fortune grandissante. De plus, il y a des branches de la production agricole qui s’industrialisent de plus en plus, comme la culture betteravière, et qui semblent devoir subir la loi de groupement de l’industrie elle-même.

Mais dans bien des régions la raréfaction de la main-d’œuvre, la diminution du prolétariat rural neutralisent toutes ces forces de développement de la grande propriété. Celle-ci a naturellement besoin d’une main-d’œuvre toujours disponible. Or, il y a