Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/362

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ouvrier français de Lille recourt successivement, et dans un très faible espace de temps, à ces deux tactiques : et comme elles sont inconciliables, il est clair qu’elles se paralysent et qu’elles le paralysent.

D’un côté, le Parti ouvrier français interprète la lutte de classe dans le sens le plus étroit, si nettement répudié par Marx. Il déclare volontiers qu’en dehors du prolétariat proprement dit, toutes les forces sociales ne forment qu’un bloc réactionnaire. Il affecte de ne pas distinguer entre les diverses catégories des classes possédantes et entre les divers partis. Il met sur le même plan, il coud dans le même sac les réactionnaires, les modérés, les radicaux socialistes. Il affirme qu’entre les cléricaux et les démocrates même d’extrême gauche, le peuple ouvrier n’a aucune différence à faire. Et même, comme les radicaux démocrates pourraient surprendre plus aisément, par quelques formules de progrès social, la confiance populaire, c’est eux que l’on dénonce avec le plus de virulence. Voilà un des aspects de la pensée du parti ouvrier français, voilà une de ses tactiques. C’est celle qui a joué à Lille au premier tour de scrutin.

Mais il y a un autre aspect, et il y a une autre tactique. Foncièrement, malgré l’affectation d’intransigeance de classe, les ouvriers socialistes du nord, adhérents au parti ouvrier français, sont