Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/374

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aux projets enfantins, calmait les effervescences. Mais un jour vint où il dut rompre. Et le 15 septembre 1850 il se retira du comité central de Londres. Il tint à justifier cette scission par une déclaration écrite, insérée au procès-verbal du comité, et qui disait ceci :


A la place de la conception critique, la minorité en met une dogmatique, à la place de l’interprétation matérialiste, l’idéaliste. Au lieu que ce soient les rapports véritables, c’est la simple volonté qui devient le moteur de la révolution. Tandis que nous disons aux ouvriers : il vous faut traverser quinze, vingt et cinquante ans de guerres civiles et de guerres entre peuples non seulement pour changer les rapports existants, mais pour vous changer vous-mêmes et vous rendre capables du pouvoir politique, vous dites au contraire : nous devons arriver de suite au pouvoir, ou alors aller nous coucher. Alors que nous attirons l'attention des ouvriers allemands sur l'état informe du prolétariat d'Allemagne, vous flattez de la façon la plus lourde le sentiment national et le préjugé corporatif des artisans allemands, ce qui, sans nul doute, est plus populaire. De même que les démocrates avaient fait du mot peuple un être sacré, vous en faites autant du mot prolétariat. Comme les démocrates, vous substituez à l'évolution révolutionnaire la phrase révolutionnaire.


Je le répète : c’est Marx qui parle. Cinquante ans ! Le délai que Marx assignait aux ouvriers non pour instaurer le communisme, mais pour se rendre capables eux-mêmes du pouvoir politique, vient d’expirer. à quelles guerres extérieures et civiles pensait Marx en 1850 ? Par quelles épreuves pensait-il que devaient passer le prolétariat et