Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/385

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d’audace des minorités, mais la vigoureuse sauvegarde des majorités.

Il est vrai encore que la Révolution fut conduite au delà de ses revendications premières et de son programme initial. Aucun des révolutionnaires, en 1789, ne prévoyait, aucun ne souhaitait la chute de la monarchie. Le mot même de République était presque inconnu, et, même au 21 septembre 1792, même quand la convention abolit la royauté, l’idée de République n’avait pas cessé tout à fait de faire peur. Mais ce n’est pas sous les coups d’une minorité passionnée, ce n’est pas sous des formules de philosophie républicaine que la royauté tomba. Elle ne fut perdue que lorsqu’il devint évident à presque toute la nation, après des épreuves répétées, après le coup d’État royal du 20 juin 1789, après le 14 juillet, après la fuite à Varennes, après l’invasion, que la royauté trahissait à la fois la Constitution et la patrie. La royauté ne tomba que lorsque la contradiction apparut, violente, insoluble, entre la royauté et la volonté générale de la nation. Ainsi c’est la logique même de la volonté générale, et non un coup de minorité, qui élimina la monarchie.


Il est bien vrai en effet que les hommes de la Révolution n’avaient pas prévu toutes les conséquences