Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/483

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Même avec toutes les réserves et restrictions que nous apporte l’étude de la réalité toujours compliquée et multiple, il reste vrai que la classe purement prolétarienne grandit en nombre, qu’elle représente une fraction toujours croissante des sociétés humaines, qu’elle est groupée en des centres de production toujours plus vastes ; il reste vrai qu’elle est toute préparée à concevoir, par la production en grand, la propriété en grand, dont la limite est la propriété sociale.

Ainsi, le socialisme, qui avec Babeuf fut comme le frisson le plus ardent de la révolution démocratique, qui, avec Fourier et Saint-Simon, fut le plus magnifique agrandissement des promesses de richesse et de puissance que le capitalisme hardi prodiguait au monde, qui, avec Proudhon, fut l’avertissement le plus aigu donné aux sociétés que l’oligarchie bourgeoise dévorait, est maintenant, avec le prolétariat et en lui, la plus forte des puissances sociales, celle qui grandit sans cesse et qui finira par déplacer à son profit, c’est-à-dire au profit de l’humanité dont elle est maintenant l’expression la plus haute, l’équilibre du monde social.

Non, le socialisme n’est pas une conception arbitraire et utopique ; il se meut et se développe en pleine réalité ; il est une grande force de vie, mêlée à toute la vie et capable bientôt d’en prendre la