Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/548

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l’État, la Convention décide, par un coup d’audace révolutionnaire incomparable, qu’elles auront un effet rétroactif jusqu’au 14 juillet 1789. Elle proclame que depuis le 14 juillet 1789 la nation est rentrée virtuellement en possession de tous ses droits, que tous les privilèges et abus du passé sont abolis de fait comme de droit depuis cette date, et que les inévitables délais pris par la révolution pour formuler en lois le droit nouveau ne sauraient être un prolongement de l’iniquité ancienne. Elle décrète en conséquence que toutes les successions ouvertes du mois de juillet 1789 au mois de novembre 1793 seront réglées par la loi nouvelle. Toutes les donations, tous les testaments par lesquels les citoyens auront disposé de plus du sixième ou du dixième de leurs biens, sont annulés ; toute inégalité de partage entre les enfants est rétroactivement abolie. Les aînés ou ceux qui ont reçu plus que leur part sont tenus de rapporter immédiatement à la masse, et un nouveau partage est fait, dans lequel les cadets, les déshérités, les moins favorisés reçoivent leur égale et juste part. Ainsi, toute la vie sociale depuis quatre ans est bouleversée et renouvelée jusqu’en son fond ; tous les rapports domestiques sont modifiés ; tous les rapports de propriété sont changés ; toutes les racines de la volonté individuelle sont arrachées, et c’est un droit social nouveau