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propriété. La loi, dans l’intérêt de la société, l’exproprie de ses habitudes ; elle fait violence à sa volonté. Et ici encore, dans le code bourgeois lui-même, et dans l’intérêt de la société bourgeoise, le droit social limite ou refoule le droit absolu de la propriété individuelle.

J’entends bien que la loi bourgeoise d’expropriation ne sort point de la sphère de la propriété individuelle. C’est l’individu qui continue à posséder. Seulement, ce qu’il possédait sous une forme, il le possède maintenant sous une autre. De là à l’expropriation socialiste, qui changera le système de la propriété, qui fera passer la propriété des moyens de production des individus à la communauté nationale, il y a un abîme. Et cet abîme, seul le mouvement de classe du prolétariat organisé peut le franchir. J’ai le droit de retenir cependant que dès aujourd’hui et dans la loi bourgeoise même, la forme de la propriété individuelle est à la merci de la puissance sociale. Et c’est un fait juridique dont les conséquences sociales peuvent être grandes.

Tout de suite, cet article de la Déclaration des Droits de l’homme fut invoqué par les révolutionnaires mêmes pour limiter le droit de propriété. Dès la fin de 1792, quand la cherté des grains et du pain souleva le peuple en bien des régions, quand