Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/274

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de malade ; en un mot, je veux que Peau-d’Âne (puisque Peau-d’Âne il y a) lui fasse promptement un gâteau. »

On courut à la métairie, et l’on fit venir Peau-d’Âne, pour lui ordonner de faire de son mieux un gâteau pour le prince.

Quelques auteurs ont assuré que Peau-d’Âne, au moment que ce prince avait mis l’œil à la serrure, les siens l’avaient aperçu : et puis, que regardant par sa petite fenêtre, elle avait vu ce prince si jeune, si beau et si bien fait, que l’idée lui en était restée, et que souvent ce souvenir lui avait coûté quelques soupirs. Quoi qu’il en soit, Peau-d’Âne l’ayant vu, ou en ayant beaucoup entendu parler avec éloge, ravie de pouvoir trouver un moyen d’être connue, s’enferma dans sa chambre, jeta sa vilaine peau, se décrassa le visage et les mains, se coiffa de ses blonds cheveux, mit un beau corset d’argent brillant, un jupon pareil, et se mit à faire le gâteau tant désiré : elle prit de la plus pure farine, des œufs et du beurre bien frais. En travaillant, soit de dessein, ou autrement, une bague qu’elle avait au doigt tomba dans la pâte, s’y mêla ; et dès que le gâteau fut cuit, s’affublant de son horrible peau, elle donna le gâteau à l’officier, à qui elle demanda des nouvelles du prince ; mais cet homme, ne daignant pas lui répondre, courut chez le prince lui porter ce gâteau.