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CONTES EN VERS.



PEAU-D’ÂNE.


Il est des gens, de qui l’esprit guindé,
Sous un front jamais déridé,
Ne souffre, n’approuve et n’estime
Que le pompeux et le sublime.
Pour moi, j’ose poser en fait,
Qu’en de certains momens l’esprit le plus parfait
Peut aimer, sans rougir, jusqu’aux marionnettes,
Et qu’il est des tems et des lieux
Où le grave et le sérieux
Ne valent pas d’agréables sornettes.
Pourquoi faut-il s’émerveiller
Que la raison la mieux sensée,
Lasse souvent de trop veiller,
Par des contes d’ogre[1] et de fée,
Ingénieusement bercée,
Prenne plaisir à sommeiller ?
Sans craindre donc qu’on me condamne
De mal employer mon loisir,
Je vais, pour contenter votre juste désir,
Vous raconter au long l’histoire de Peau-d’Âne.

  1. Homme sauvage, qui mangeait les petits enfans.
    (Note de l’Auteur.)