Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Selon les divers goûts dont on est prévenu,
Chacun, en quelqu’endroit que le hasard le porte,
Ne rencontre et ne voit que des gens de sa sorte.
Ceux qui, par le savoir se sont rendus fameux,
Ne trouvent, sur leurs pas, que des savants comme eux.
Ceux qui, cherchant toujours la pierre bien-aimée,
Ont l’art de convertir leur argent en fumée,
Ne trouvent que des gens, qui fondant le métal,
Par le même chemin courent à l’hôpital.
L’homme de symphonie et de fine musique,
Abordera toujours un homme qui s’en pique ;
Et ceux, qui de rubis se bourgeonnent le nez,
En rencontrent partout d’encor plus bourgeonnés.
Ceux qu’à le bien servir le Tout-Puissant appelle,
Ne trouvent que des saints brulants du même zèle,
Que des cœurs où le ciel ses dons a répandus ;
Faut-il donc s’étonner si des hommes perdus,
Jugeant du sexe entier par celles qu’ils ont vues,
Assurent qu’il n’est plus que des femmes perdues !
Pour six qui, sans cervelle avec un peu d’appas,
Feront de tous côtés du bruit et du fracas,
Par leur danse, leur jeu, leurs folles mascarades,
Leurs cadeaux indiscrets, leurs sombres promenades,
Sans peine on trouvera mille femmes de bien,
Qui vivent en repos, et dont on ne dit rien.

À toute heure, en tous lieux, la coquette se montre ;
Il n’est point de plaisirs où l’on ne la rencontre :
Allez au cours, au bal, allez à l’Opéra,
À la foire, il est sûr qu’elle s’y trouvera.
Il semble, à regarder l’essor de sa folie,
Que pour être partout elle se multiplie.