Elle apprit avec l’âge et les soins de l’école,
A si bien réparer son défaut de parole,
Que du geste aisément elle sut s’exprimer,
Et, non moins que sa sœur, discourir et charmer.
Si juste elle savait, d’une adresse incroyable,
Donner à chaque objet sa couleur véritable,
Que l’œil, en le voyant de la sorte imité,
Demandait à la main si c’était vérité.
Sitôt qu’elle parut sur la voûte étemelle,
Tous les dieux étonnés eurent les yeux sur elle,
Et, pour apprendre un art si charmant et si beau,
Chacun d’eux, à l’envi, prit en main le pinceau.
Le maître souverain du ciel et de la terre,
D’un rouge étincelant colora son tonnerre,
Et marqua d’un trait vif, dans le vague des airs,
L’éclat éblouissant de ses brillans éclairs.
Dès la pointe du jour la diligente Aurore,
Depuis l’Inde fameux jusqu’au rivage More,
Couvrit tout l’horizon d’un or luisant et pur,
Pour y répandre ensuite et le pourpre et l’azur.
Celui qui des saisons fournit l’ample carrière,
Fit toutes les couleurs de sa seule lumière,
Et ses rayons dorés, sur la terre et les eaux,
Furent, dès ce moment, comme autant de pinceaux
Qui, touchant les objets d’une légère atteinte,
Leur donnèrent à tous leur Véritable teinte.
D’un trait ingénieux l’inimitable Lis
Traça, sur le fonds bleu du céleste lambris,
Un grand arc triomphal, dont les couleurs brillantes,
S’unissant l’une à l’autre, et pourtant différentes,
De leur douce nuance enchantèrent les yeux,
Et furent l’ornement de la voûte des cieux.
Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/379
Apparence
Cette page n’a pas encore été corrigée