Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/394

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Sur les uns le vieillard, à qui tout est possible,
Passait de son pinceau la trace imperceptible,
D’une couche légère allait les brunissant,
Y marquait des beautés, même en les effaçant ;
Et d’un noir sans égal fortifiant les ombres,
Les rendaient plus charmants en les rendant plus sombres,
Leur donnait ce teint brun qui les fait respecter,
Et qu’un pinceau mortel ne saurait imiter.
Sur les autres tableaux, d’un mépris incroyable,
Il passait, sans les voir, l’éponge impitoyable ;
Et loin de les garder aux siècles à venir,
Il en effaçait tout jusques au souvenir.


Mais, Le Brun, si le temps, dans la suite des âges,
Loin de les effacer embellit tes ouvrages,
Et si ton art t’élève au comble de l’honneur,
Sache que de Louis t’est venu ce bonheur ;
Quand le ciel veut donner un héros à la terre,
Aimable dans la paix, terrible dans la guerre,
Dont le nom soit fameux dans la suite des ans,
Il fait naitre avec lui des hommes excellents,
Qui sont, par leurs vertus, leur courage et leur zèle,
Les dignes instruments de sa gloire immortelle ;
Et qui, pour son amour, l’un de l’autre rivaux ?
Se suivent à l’envi dans ses rudes travaux ;
De là nous sont donnés ces vaillants capitaines,
Qui, semant la terreur dans les belgiques plaines,
Et courant aux dangers sur les pas de Louis,
Secondent de leurs bras ses exploits inouïs ;
De là viennent encore, et prennent leur naissance,
Ces Nestors de nos jours, dont la rare prudente
Travaillant sous le prince au bien de ses sujets,