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ET LES FLAGELLÉS DE PARIS

— Tu sais, ma vieille, tu fais un peu trop de réclame, ce soir.

— Va donc te baigner, andouille, lui répondit-elle, mon médecin m’a ordonné de lui faire prendre l’air.

La Goulue accaparait donc seule le succès, ce que voyant, les autres danseuses refusèrent de figurer avec elle dans le quadrille ; elle était bien embarrassée et ne savait plus à quels saints se vouer ; lorsque, un soir, dans le public qui faisait cercle, attendant le commencement de l’ouverture de l’orchestre, elle avisa une jolie fille de taille moyenne, bien prise, mais l’air gauche, dépaysée, au milieu du troupeau de filles et du luxe de toilette des tendeurs. La Goulue l’interpella : « Viens me faire vis à vis, toi, la môme. » En même temps, elle envoya le Désossé lui prendre le bras, il la plaça devant elle ; la pauvre fille, confuse, rougissante, ne savait quelle contenance tenir. Au premier coup d’archet, les danseuses s’ébranlèrent, elle, n’osait ni avancer, ni reculer. « Grouille-toi donc, eh ! dinde, lui cria la Goulue, y vont pas te bouffer, y n’aiment pas le torchon. » Enfin, elle se décida à esquisser un pas, si cocasse, si naïf, que la foule crut à une chose entendue et qu’elle se mit à applaudir avec fureur la ballerine malgré elle.

Les soirs, les Lesbiennes se l’arrachaient ; en tête, était la célèbre Béatrice (la tête de cheval) qui s’in-