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LES FLAGELLANTS

ce qu’une nuit de balà l’Opéra, elle soupait avec plusieurs jeunes gens, à la Maison Dorée. Un des convives la pria de désigner le mets qu’elle désirait, elle répondit sans hésitation : une bouillabaisse ; à tous les services elle demanda une bouillabaisse.

Tous les convives se mirent à applaudir, on la baptisa Bouillabaisse et on lui fit, séance tenante, vingt propositions. Nina était une fille intelligente, elle se tint ce raisonnement : Tant que je n’étais que Nina, je n’avais que des amants plus rosses et plus mufles les uns que les autres, ils jouaient à la balle avec moi ; le matin un blond, à midi un châtain, le soir un brun ; la nuit il aurait fallu un tourniquet à ma porte, et toujours la dèche ; je demande une bouillabaisse et les amants sérieux tombent comme grêle. Puisque à Paris la bouillabaisse est un talisman, je ne demanderai plus au restaurant que mon plat national.

Au café Anglais : Garçon, une bouillabaisse ; chez Julien, une bouillabaisse ; partout en un mot, ce fut pendant quinze jours le mot à la mode.

À la Bourse : La bouillabaisse est à 120 francs, dont 10.

Au Cercle : Je te joue une nuit chez Bouillabaisse en cinq sec.

Ce fut à Nina Bouillabaisse qu’arriva l’aventure