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que seulement pour lui et pour son ami, sans se préoccuper le moins du monde de savoir si elle sera jamais exécutée et acceptée par un public quelconque. Le désir de briller par ses productions s’empare rarement d’un Allemand. La plupart de nos musiciens ne sauraient même pas comment s’y prendre et comment paraître devant le public. La patrie de l’Allemand est divisée en une foule de royaumes, d’électorats, de duchés, et de villes libres. S’il habite une petite ville dans un duché, il ne lui vient pas un instant à l’idée d’y briller, car il n’y trouverait pas de public ; s’il a vraiment de l’ambition, ou s’il lui faut vivre par sa musique, il va dans la capitale de son duché ; mais dans cette petite capitale il y a déjà beaucoup d’habiles musiciens, il lui sera donc bien difficile de faire son chemin. Il finit enfin par percer ; sa musique plaît ; mais dans le duché voisin pas une âme ne connaît son nom ; comment commencer à se faire connaître en Allemagne ? Il le tente, mais dans l’intervalle il vieillit et meurt sans que nul prononce son nom à l’avenir. C’est là l’histoire de centaines de musiciens.

Comment s’étonner, alors, s’il y en a des milliers qui ne se donnent même pas la peine de chercher à se faire une carrière comme musiciens ? Ils préfèrent gagner leur vie en pratiquant un métier pour pou-