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ils ne seront plus les mêmes : une sorte de sauvagerie, de timidité ne leur permettra pas de lever les yeux ; ils deviendront anxieux et craindront de ne pouvoir vous satisfaire ; ils s’informeront du genre artistique en faveur, et, par un manque de confiance en eux-mêmes, ils oublieront, tout honteux, leur naturel pour imiter rapidement un air qu’ils ne connaissent que par ouï dire. Ils s’efforceront timidement de vous donner eux aussi des morceaux brillants.

Les mêmes voix qui chantaient d’une manière si touchante le beau lied allemand s’exerceront bien vite aux fioritures italiennes. Mais ces « passages » et ces fioritures ne leur porteront pas bonheur ; car vous les avez bien entendus ailleurs, bien mieux exécutés, et ces maladroits vous ennuieront. Et pourtant, ces maladroits sont de véritables artistes, et dans leur cœur brille plus de flamme et plus de chaleur que n’en ont jamais répandu sur vous ceux qui enchantent vos élégants salons ? Qu’est-ce donc qui a gâté ces artistes ? — Leur trop grande modestie et une sorte de fausse honte. Voilà le côté triste de l’histoire de la musique allemande [1].

  1. Ces douleurs et cette fausse honte ont été heureusement vaincues à notre époque. (Note de l’éditeur.)