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CHAPITRE IV

Le réveil. — Le départ. — Les chachalacas. — Changement de route. — La forêt. — Les saraguatos. — Deuxième campement. — Épisodes anciens.

Pour Éléonore et Pancho, qui dormaient pour la première fois en pleine forêt, la nuit fut passablement agitée ; un sommeil léger, souvent interrompu, permettait à leurs oreilles inquiètes de percevoir les moindres bruits, pétillement du feu, pas de la sentinelle, mule broyant les feuilles du ramon, gémissements lointains des fauves, cris des oiseaux nocturnes, sans parler de l’insupportable bourdonnement des moustiques. Cependant ils furent debout aux premières agitations du camp. La levée d’un campement est peut-être plus pittoresque que son installation. Bien avant le jour tout n’est que rumeur ; il faut préparer le déjeuner des hommes, mener les mules à l’abreuvoir et leur donner un dernier paquet de feuillage. Le jour vient rapide, comme il s’éteint, subitement ; les pays des tropiques ne connaissent pour ainsi dire ni l’aurore ni le crépuscule. On se hâte, car il faut partir de bon matin pour éviter les heures brûlantes, et pendant que Yan et le cuisinier indien préparent le déjeuner de la troupe, chacun procède aux ablutions matinales. Grande affaire, car, surtout en voyage, la propreté est l’une des plus importantes prescriptions de l’hygiène.

Le café, un morceau de viande sèche retourné sur des charbons ardents, un petit plat de haricots noirs assaisonnés de piment,