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Page:Charnay Désiré Aventures d'une famille en voyage 1898.djvu/42

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Pancho avait rapidement parcouru le village et la plaine, puis était allé se jeter dans la rivière, où il avait pris un bain délicieux.

Le soir, la famille, réunie sous la véranda de la maison se reposait, prenant le frais, des fatigues des journées précédentes ; elle assistait à la rentrée des travailleurs qui, des environs où ils abattaient les bois, revenaient chaque soir au campement ; devant les cases le feu s’allumait, on voyait les femmes broyer le maïs et préparer le souper des Indiens ; et comme la fatigue a peu de prise sur des hommes entraînés aux plus durs travaux, ils prolongeaient la soirée, mêlant leurs voix aux sons d’une guitare fêlée, esquissant quelques danses indiennes ou de joyeux fandangos.

« Mes enfants, dit Frémont, nous voici dans le pays de l’acajou : le trouvez-vous intéressant ?

— Oh oui ! père, firent-ils en chœur.

— Voulez-vous savoir comment on l’exploite, comment il voyage, ce qu’il vaut, et ce qu’on en fait ?

— Oui, oh oui ! père.

— Eh bien, avec la permission de Sulpice, je vais pour une seule fois prendre sa place et vous raconter une histoire ; les dénominations scientifiques vous font peur, et j’appellerai un chat un chat et l’acajou acajou. Caoba en espagnol, comme vous le savez.

Swietenia Mahogoni, soupira Sulpice.

— J’ajouterai que l’on fait, dériver ce nom d’acajou du brésilien acajaibo. C’est un bel arbre ; vous en avez vu et vous en verrez d’autres ; il a le port du chêne et presque la même écorce, quoique moins rugueuse ; il vit moins longtemps parce qu’il se développe plus vite, grâce au climat chaud sous lequel jamais la sève ne s’arrête ; les plus gros ne peuvent compter au delà de deux siècles, mais cela tient surtout aux mille parasites qui, dans nos forêts, en précipitent la chute.

« Il y a longtemps que l’acajou a été recherché pour sa dureté, la finesse de son grain et le brillant de son poli. Autrefois les Indiens l’employaient pour leurs constructions, je parle des