rien de propre. Tiercement c’est celle qui nous rend et nous denomme bons ou meschans, qui nous donne
la trempe et la teincture. Comme de tous les
biens qui sont en l’homme, la preud’hommie
est le premier et principal, et qui de loin passe
la science, l’habilité ; aussi faut-il dire que la
volonté où loge la bonté et vertu est la plus
excellente de toutes : et de faict pour entendre
et sçavoir les belles, bonnes et honnestes
choses, ou meschantes et deshonnestes, l’homme
n’est bon ny meschant, honneste ny deshonneste,
mais pour les vouloir et aymer :
l’entendement a bien d’autres preeminences ;
car il est à la volonté comme le mary à la femme,
le guide et flambeau au voyager, mais
en celles icy il cede à la volonté.
La vraye difference de ces facultés est en ce que par l’entendement les choses entrent en l’ame, et elle les reçoit, comme portent les mots d’apprendre, concevoir, comprendre, vrays offices d’icelui : et y entrent non entieres et telles qu’elles sont, mais à la proportion, portée et capacité de l’entendement, dont les grandes et hautes se raccourcissent et abaissent aucunement par ceste entrée, comme l’ocean n’entre tout entier en la mer mediterranée, mais à la proportion de l’emboucheure du destroit de Gibraltar. Par la volonté au contraire, l’ame sort hors de soy et va se loger et vivre ailleurs en la chose aimée, en laquelle elle se transforme, et en porte le nom,