que, par l’envie, nous ne considerons le bien qu’en ce qu’il est arrivé à un autre, et que nous le desirons pour nous ; et la jalousie est de nostre bien propre, auquel
nous craignons qu’un autre participe.
Jalousie est maladie d’ame foible, sotte et inepte, maladie terrible et tyrannique ; elle s’insinue soubs tiltre d’amitié : mais après estre en possession, sur les mesmes fondemens de bienveillance, elle bastit une hayne capitale ; la vertu, la santé, le merite, la reputation, sont les bouttefeus de ceste rage.
C’est aussi un fiel qui corrompt tout le miel de nostre vie : elle se mesle ordinairement ès plus doulces et plaisantes actions, lesquelles elle rend si aigres et si ameres que rien plus : elle change l’amour en hayne, le respect en desdain, l’asseurance en defiance. Elle engendre une curiosité pernicieuse de se vouloir esclaircir de son mal, auquel il n’y a poinct de remede qui ne l’empire et ne l’engrege [1] : car ce n’est que le publier, arracher de l’ombre et du doubte pour le mettre en lumiere, et le trompetter par-tout, et estendre son malheur jusques à ses enfans.
Advis et remedes particuliers contre ce mal sont liv. III, chapitre XXXV.
- ↑ L'aggrave.