muns et populaires ; maintenant son esprit net, libre, franc, universel, considérant et jugeant de toutes choses, sans s’obliger ny jurer a aucune, visant tous jours et se reglant en toutes
choses selon nature, c’est a dire la raison, premiere
et universelle loi et lumiere inspirée de
Dieu, qui esclaire en nous, à laquelle il ploye
et accommode la sienne propre et particuliere,
vivant au dehors et avec tous, selon les loix, coutumes
et ceremonies du pays où il est, sans offense
de personne, se portant si prudemment et
discretement en tous affaires, allant tousjours
droit, ferme, joyeux et content en soy-mesme,
attendant paisiblement tout ce qui peut advenir,
et la mort en fin. Tous ces traits et parties, qui
sont plusieurs, se peuvent pour facilité racourcir
et rapporter a quatre chefs principaux, cognoissance
de soy, liberté d’esprit nette et genereuse,
suyvre nature, (cettuy-cy a très grande estendue,
et presque seul suffiroit) vray contentement : lesquels
ne se peuvent trouver ailleurs qu’au sage.
Celuy qui faut en l’un de ces points, n’est point
sage. Qui se mescognoit, qui tient son esprit en
quelque espece de servitude, ou de passions, ou
d’opinions populaires, le rend partial, s’oblige
à quelque opinion particulière, et se prive de la
liberté et jurisdiction de voir, juger, examiner
toutes choses : qui heurte et va contre nature,
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XLIII
PRÉFACE.