ceux qui, foibles de corps, ont l’esprit grand, fort et puissant, est-ce pas grand dommage de les enferger
[1] et garrotter à la chair et au mariage, comme
l’on faict les bestes à l’estable ? Nous voyons
mesme cela aux bestes ; car les nobles qui
sont de valeur et de service, chevaux, chiens,
l’on les esloigne de l’accointance de l’autre
sexe ; l’on ne met aux haras que les bestes de
moindre estime. Aussi ceux qui sont destinés,
tant hommes que femmes, à la plus venerable
et saincte vacation, et qui doibvent estre
comme la cresme et la mouelle de la chrestienté,
les gens d’église et de religion, sont
exclus du mariage. Et c’est pource que le mariage
empesche et destourne les belles et grandes
elevations de l’ame, la contemplation des
choses hautes, celestes et divines, qui est
incompatible avec le tabut
[2] des affaires domestiques ; à cause de quoy l’apostre
[3]
prefere la solitude de la continence au mariage. L’utile peust bien estre du costé du mariage, mais l’honneste est de l’autre costé.
Puis il trouble les belles et sainctes entreprinses, comme Sainct Augustin recite qu’ayant deseigné avec quelques autres siens amis, dont il y en avoit de mariés, de se retirer de la ville et des compagnies pour