faire, preferable à toute autre chose, non seulement
science, noblesse, richesses, mais à la sagesse
mesme, ce disent les plus austeres sages. C’est la
seule chose qui merite que l’on employe tout,
voire la vie mesme, pour l’avoir ; car sans elle la
vie est sans goust, voire est injurieuse, la vertu
et la sagesse ternissent et s’esvanouissent sans
elle. Quel secours apportera au plus grand
homme qui soit, toute la sagesse, s’il est frappé
du haut mal, d’une apoplexie ? Certes je ne luy
puis preferer aucune chose que la seule
preud’hommie, qui est la santé de l’ame. Or combien
que ce soit un don de nature, gaudeant bene nati
[1],
octroyé en la premiere conformation,
si est-ce que ce qui vient après le laict,
le bon reiglement de vivre, qui consiste en
sobrieté, mediocre exercice, se garder de
tristesse et toute sorte d'émotion, la conserve
fort. La maladie et la douleur sont ses contraires,
qui sont les plus grands et peust-estre
les seuls maux de l’homme, desquels sera parlé cy après :
mais en cette conservation les bestes aussi, suivant simplement nature qui a donné la santé, ont l'advantage ; l'homme s'y oublie souvent, et puis le paye en son temps.
La beauté vient après, qui est une piece de grande
- ↑ « Que ceux qui sont heureusement nés s'en réjouissent ».