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Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/331

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rien plus pernicieux que le conseil du cabinet. Et les ayant choisis et trouvez, il s’en doibt servir prudemment en prenant conseil d’eux à temps et heure, sans attendre au poinct de l’execution, et perdre le temps en les escoutant ; et avec jugement, sans se laisser aller laschement à leur advis, comme ce sot d’empereur Claude ; et avec douceur aussi sans roidir trop, estant plus raisonnable, comme disoit le sage Marc Antonin, de suyvre le conseil d’un bon nombre de ses amis, qu’eux soyent contraincts de flechir soubs sa volonté. Et s’en servant avec une authorité indifferente, sans les payer par presens pour leurs bons conseils, affin de n’attirer les mauvais soubs espoir de recompense : ny aussi les rudoyer pour leurs mauvais conseils ; car il ne se trouveroit plus qui voulsist donner conseil, s’il y avoit danger à le donner. Et puis souvent les mauvais reussissent bien et mieux que les bons, ainsi disposant la souveraine pourvoyance. Et ceux qui donnent les bons conseils, c’est-à-dire heureux et asseurez, ne sont pas pour cela tousiours les meilleurs et plus fideles serviteurs, ny pour leur liberté à parler, laquelle il doibt plustost agreer, et regarder obscurement les crainctifs et flatteurs ;