Page:Chartier - La Belle Dame sans merci, 1901, éd. Charpennes.djvu/35

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d’un changement dans sa destinée. Il a une maîtresse qui lui impose, il est vrai, un stage d’épreuve. En outre, il ne se dépeint plus comme n’osant ouvrir la bouche devant les Dames. Au contraire, les Dames le prennent pour arbitre. Cette faveur atteint son apogée avec le Lai de la Belle Dame sans Merci : nous voyons « les Dames de la Royne », Katherine, Marie et Jehanne, lui transmettre d’« Yssoldun »[1] la requête baillée contre lui dans une lettre affectueuse qui est un bon signe de cette faveur. En outre, le poème fait tapage, et ce n’est pas à l’œuvre d’un débutant que le public ménage à l’ordinaire de ces succès. Déjà, maître Alain a perdu sa maîtresse ; ce détail place le Lai de la Belle Dame sans Merci à peu de distance de la Complainte trepiteuse contre la Mort qui lui ôte sa Dame.

Malgré les malheurs du temps, la cour res-

  1. Le poème paraît avoir été composé en 1426 : il parvint en janvier 1427 à Issoudun où Charles VII tenait alors sa cour, en l’absence du poète, qui était sans doute occupé à quelque mission diplomatique. À Issoudun, en mars 1427, Richemont fait saisir Giac dans son lit et plus tard noyer Giac, le favori du roi, et Charles n’osait rien dire ; la France était au plus bas ; Jeanne D’Arc allait paraître (Gaston Paris. Romania, 1887).