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sément l’évasion des militaires, et l’instruction de cette affaire se trouvait confiée à M. Schmidt, capitaine d’état major ; or, j’avais répondu sur ce chef, et la maxime non bis idem se trouvait complétement violée. Je m’empressai d’écrire soit à M. Massot, procureur de la République, soit à M. Schmidt et, tout en faisant des réserves sur l’illégalité de la procédure, je réclamais un nouvel interrogatoire. Il me fut promis pour le lundi ou le mardi suivant.

Mais alors j’étais rassuré, car mes réponses que rien ne pouvait démentir, devaient amener le même résultat, c’est-à-dire mon acquittement.

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LA MISE EN LIBERTÉ.


Libertas quæ sera tamen…
Virg.


Souffre, espère et poursuis, telle doit être la devise du prisonnier.

Je m’attendais, le lundi 9 juillet, à un nouvel interrogatoire, lorsque ma mise en liberté me fut apportée par ma femme. Elle était parvenue à trouver réunis MM. Massot et Schmidt et le dialogue avait été court. C’est que je n’avais plus à faire à cette police dont le zèle inintelligent compromet le pouvoir plus qu’elle ne le sert ; à cette police dont M. Odilon Barrot a dit : « Il n’y a point de révolution pour elle ; elle les traverse toutes avec ses habitudes, avec ses ignobles manœuvres et trop souvent avec son personnel. »

Mon sort était entre les mains de deux hommes d’honneur et ils se comprirent. Qu’en pensez-vous ? avait dit le procureur de la République ; Comme vous voudrez, avait répondu M. Schmidt et M. Massot s’était empressé de signer ma mise en liberté. J’avais eu pour auxiliaires aux sollicitations d’une épouse, l’intégrité d’un magistrat et la loyauté d’un soldat.

Je suis donc libre ! il est deux heures et demi. Je ne pense pas qu’on ait attendu jusque là pour me priver du droit de voter. Qu’importe après tout ! un bruit favorable à l’élection de Jules Favre, a circulé et est venu réjouir les prisonniers.

Je suis libre et ma vie recommence : est-ce vivre qu’être en prison ? Est-ce vivre que de compter lentement les heures dans une oisiveté qui énerve l’âme et le corps ?

Béni soit celui qui vous apporte la liberté ! et quand c’est une