Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 10.djvu/396

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DEPUIS
LA CAPTIVITÉ DU ROI
JUSQU’À L’ÉTABLISSEMENT DE LA RÉPUBLIQUE.
1647-1648.


Près d’une moitié de la propriété anglaise avait été séquestrée par le parlement, sous le prétexte de l’attachement que les propriétaires conservaient aux opinions royalistes. Le clergé anglican était errant dans les bois ; des victimes entassées dans les pontons, sur la Tamise, périssaient de maladie, et quelquefois de faim. On avait établi des comités investis du droit de vie et de mort, lesquels, sans forme de procès, dépouillaient les citoyens. Ces comités exerçaient des vengeances, vendaient la justice et protégeaient le crime.

Tous ces maux rendirent l’entreprise de l’armée contre le parlement extrêmement populaire, car, dans le mouvement des ambitions et dans le ressentiment des misères publiques, on n’examina pas jusqu’à quel point le succès de la révolution n’avait pas tenu à des rigueurs que l’humanité, l’équité et la morale ne pouvaient d’ailleurs justifier.

Après avoir chassé les presbytériens du parlement, l’armée entama, à l’exemple de ce même parlement, des négociations avec le roi.

Cromwell pensa-t-il d’abord à se réunir à Charles ? On l’a cru. John Cromwell, un de ses cousins, lui avait entendu dire à Hamptoncourt : « Le roi est injustement traité, mais voici ce qui lui fera rendre justice ; » il montrait son épée. Il est certain qu’Ireton et Cromwell eurent des pourparlers fréquents à Hamptoncourt avec les agents du roi. Charles offrait dit-on, à Cromwell l’ordre de la Jarretière et le titre de comte d’Essex ; mais Cromwell prévit tant d’opposition de la part des agitateurs et des niveleurs, qu’il se décida à les suivre. L’esprit républicain, en forçant un simple citoyen à refuser un cordon, lui