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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 4.djvu/17

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retrouver dans l’Hiéroclès de la Bibliothèque de Photius l’Hiéroclès réfuté par Eusèbe[1], sert plutôt à confirmer qu’à détruire l’opinion de Pearson. Dacier, qui, comme l’observe Boileau, veut toujours faire un sage de l’écrivain qu’il traduit[2], combat le sentiment du savant Pearson ; mais les raisons de Dacier sont foibles, et il est probable que Hiéroclès, persécuteur et auteur du Philaléthès, est aussi l’auteur du Commentaire.

D’abord vicaire des préfets, Hiéroclès devint ensuite gouverneur de la Bithynie. Les Ménées[3], saint Épiphane[4], et les actes du martyre de saint Édèse[5], prouvent que Hiéroclès fut aussi gouverneur de l’Égypte, où il exerça de grandes cruautés.

Fleury, qui suit ici Lactance en parlant d’Hiéroclès, parle encore d’un autre sophiste qui écrivoit dans le même temps contre les chrétiens. Voici le portrait qu’il fait de ce sophiste inconnu :

« Dans le même temps que l’on abattait l’église de Nicomédie, il y eut deux auteurs qui publièrent des écrits contre la religion chrétienne. L’un étoit philosophe de profession, mais dont les mœurs étoient contraires à la doctrine : en public il commandoit la modération, la frugalité, la pauvreté ; mais il aimoit l’argent, le plaisir et la dépense, et faisoit meilleure chère chez lui qu’au palais : tous ses vices se couvroient par l’extérieur de ses cheveux et de son manteau… Il publia trois livres contre la religion chrétienne. Il disoit d’abord qu’il étoit du devoir d’un philosophe de remédier aux erreurs des hommes… ; qu’il vouloit montrer la lumière de la sagesse à ceux qui ne la voyoient pas, et les guérir de cette obstination qui les faisoit souffrir inutilement tant de tourments. Afin que l’on ne doutât pas du motif qui l’excitoit, il s’étendoit sur les louanges des princes, relevoit leur piété et leur sagesse, qui se signaloient même dans la défense de la religion, en réprimant une superstition impie et puérile[6].

La lâcheté de ce sophiste, qui attaquoit les chrétiens tandis qu’ils étoient sous le fer du bourreau, révolta les païens mêmes, et il ne reçut pas des empereurs la récompense qu’il en attendait[7].

Ce caractère, tracé par Lactance, prouve que je n’ai donné à Hiéroclès que

  1. Pour soutenir son opinion, Jonsius dit que cet Eusèbe n’est pas celui de Césarée.
  2. Bolœana.
  3. Menœa magna Groecorum, p. 177, Venet., 1525.
  4. Epiphanii Panarium adversus hæreses, p. 717. Lutetiæ, 1622.
  5. De Martyr. Palest., cap. IV. Euseb.
  6. Hist. ecclés., liv. VIII, t. II, p. 420, édit in-8o. Paris, 1717.
  7. Lact., Instit., lib. V, cap. IV, p. 470.