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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 5.djvu/298

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elle conserve les marques de son origine grecque. Sa forme est celle d’une croix. La longue nef, ou, si l’on veut, le pied de la croix est orné de quarante-huit colonnes d’ordre corinthien, placées sur quatre lignes. Ces colonnes ont deux pieds six pouces de diamètre près la base, et dix-huit pieds de hauteur, y compris la base et le chapiteau. Comme la voûte de cette nef manque, les colonnes ne portent rien qu’une frise de bois qui remplace l’architrave et tient lieu de l’entablement entier. Une charpente à jour prend sa naissance au haut des murs et s’élève en dôme pour. porter un toit qui n’existe plus, ou qui n’a jamais été achevé. On dit que cette charpente est de bois de cèdre, mais c’est une erreur. Les murs sont percés de grandes fenêtres : ils étaient ornés autrefois de tableaux en mosaïque et de passages de l’Evangile, écrits en caractères grecs et latins : on en voit encore des traces. La plupart de ces inscriptions sont rapportées par Quaresmius. L’abbé Mariti relève avec aigreur une méprise de ce savant religieux, touchant une date : un très habile homme peut se tromper ; mais celui qui en avertit le public sans égard et sans politesse prouve moins sa science que sa vanité.

Les restes des mosaïques que l’on aperçoit çà et là, et quelques tableaux peints sur bois, sont intéressants pour l’histoire de l’art : ils présentent en général des figures de face, droites, raides, sans mouvement et sans ombre ; mais l’effet en est majestueux et le caractère noble et sévère. Je n’ai pu en examinant ces peintures m’empêcher de penser au respectable M. d’Agincourt, qui fait à Rome l’ Histoire des Arts du dessin dans le moyen âge 23. , et qui trouverait à Bethléem de grands secours.

La secte chrétienne des Arméniens est en possession de la nef que je viens de décrire. Cette nef est séparée des trois autres branches de la croix par un mur, de sorte que l’église n’a plus d’unité. Quand vous avez passé ce mur, vous vous trouvez en face du sanctuaire ou du chœur, qui occupe le haut de la croix. Ce chœur est élevé de trois degrés au-dessus de la nef. On y voit un autel dédié aux mages. Sur le pavé au bas de cet autel on remarque une étoile de marbre : la tradition veut que cette étoile corresponde au point du ciel où s’arrêta l’étoile miraculeuse qui conduisit les trois rois. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’endroit où naquit le Sauveur du monde se trouve perpendiculairement au-dessous de cette étoile de marbre, dans l’église souterraine de la Crèche. Je parlerai de celle-ci dans un moment. Les