Aller au contenu

Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 5.djvu/310

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

marin et de l’acide sulfurique ; il n’y a point d’alumine ; elles ne sont point saturées de sel marin ; elles ne changent point les couleurs, telles que le tournesol ou la violette. Elles tiennent en dissolution les substances suivantes, et dans les proportions que nous allons indiquer :

Muriate de chaux…………..3,920
- de magnésie…………… 10,246
- de soude……………… 10,360
Sulfate de chaux…………. 0,054
24,580 sur 100

Ces substances étrangères forment donc environ un quart de son poids à l’état de dessiccation parfaite ; mais desséchées seulement à 180 degrés (Fahrenheit), elles en forment 41 pour 100. M. Gordon, qui a apporté la bouteille d’eau soumise à l’analyse, a lui-même constaté que les hommes y flottent, sans avoir appris à nager. "

Je possède un vase de fer-blanc rempli de l’eau que j’ai prise moi-même dans la mer Morte. Je ne l’ai point encore ouvert, mais au poids et au bruit je juge que le fluide est un peu diminué. Mon projet était d’essayer l’expérience que Pococke propose, c’est-à-dire de mettre des petits poissons de mer dans cette eau et d’examiner s’ils y pourraient vivre : d’autres occupations m’ayant empêché de tenter plus tôt cet essai, je crains à présent qu’il ne soit trop tard.

La lune en se levant à deux heures du matin amena une forte brise qui ne rafraîchit pas l’air, mais qui agita un peu le lac. Le flot chargé de sel retombait bientôt par son poids et battait à peine la rive. Un bruit lugubre sortit de ce lac de mort, comme les clameurs étouffées du peuple abîmé dans ses eaux.

L’aurore parut sur la montagne d’Arabie en face de nous. La mer Morte et la vallée du Jourdain se teignirent d’une couleur admirable ; mais une si riche apparence ne servait qu’à mieux faire paraître la désolation du fond.

Le lac fameux qui occupe l’emplacement de Sodome et de Gomorrhe est nommé mer Morte ou mer Salée dans l’Ecriture, Asphaltite par les Grecs et les Latins, Almotanah et Bahar-Loth par les Arabes, Ula-Degnisi par les Turcs. Je ne puis être du sentiment de ceux qui supposent que la mer Morte n’est que le cratère d’un volcan. J’ai vu le Vésuve, la Solfatare, le Monte-Nuovo dans le lac Fusin, le Pic-des-Açores, le Mamelife vis-à-vis de Carthage, les volcans éteints d’Auvergne ; j’ai partout remarqué les mêmes caractères, c’est-à-dire des montagnes creusées en entonnoir, des laves et des cendres où l’action