Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/250

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chaîne nord-ouest de nos lacs et leurs bords jusqu’à la mer. C’est pourquoi les Indiens que nos ancêtres trouvèrent offroient une population beaucoup plus considérable au nord qu’au midi, à l’orient qu’à l’occident des États-Unis d’aujourd’hui : de là ces vastes cimetières, ces piles immenses d’écaillés d’huîtres, ces amas de pointes de flèche et autres objets que l’on trouve dans la partie orientale des États-Unis, tandis que la partie occidentale en renferme très-peu : là, nous voyons que les Indiens y habitoient depuis les temps les plus reculés ; ici, tout annonce une race nouvelle ; on reconnoît aisément la fosse d’un Indien : on les enterroit ordinairement assis ou debout. Partout où l’on voit des trous irréguliers d’un à deux pieds de diamètre, si l’on creuse à quelques pieds de profondeur, on est sûr de tomber sur les restes d’un Indien. Ces fosses sont très-communes sur les rives méridionales du lac Érié, jadis habitées par les Indiens nommés Cat, ou Ottoway. Ils mettent ordinairement dans la tombe quelque objet cher au défunt : le guerrier emporte sa hache d’armes ; le chasseur, son arc et ses flèches et l’espèce de gibier qu’il préféroit. C’est ainsi que l’on trouve dans ces fosses tantôt les dents d’une loutre, tantôt celles d’un ours, d’un castor, tantôt le squelette d’un canard sauvage, et tantôt des coquilles ou des arêtes de poisson.

II. — antiquités de peuples provenant d’origine européenne.

Au titre de cette division, l’on sourira peut-être en se rappelant qu’à peine trois siècles se sont écoulés depuis que les Européens ont pénétré dans ces contrées : cependant on me permettra de le conserver, parce qu’on trouve quelquefois des objets provenant des relations établies depuis plus de cent cinquante années entre les indigènes et diverses nations européennes, et que ces sujets sont souvent confondus avec d’autres qui sont réellement très-anciens. Les François sont les premiers Européens qui aient parcouru le pays que comprend aujourd’hui l’État d’Ohio. Je n’ai pu m’assurer exactement de l’époque, mais nous savons par des documents authentiques, publiés à Paris dans le xviie siècle[1], qu’ils avoient, en 1655, de vastes établissements dans le territoire Onondaga, appartenant aux six nations.

Charlevoix, dans son Histoire de la Nouvelle-France, nous apprend que l’on envoya, en 1654, à Onondaga, des missionnaires qui y bâti-

  1. Historiæ Canadensis, sive Novæ Franciæ, Libri decem, ad annum usque Christi 1661 ; par le jésuite François Creuxius.