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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/374

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« Ces remparts, dit M. Mazois, étoient composés d’un terre-plein terrasse et d’un contre-mur ; ils avoient quatorze pieds de largeur, et l’on y montoit par des escaliers assez spacieux pour laisser passage à deux soldats de front. Ils sont soutenus, du côté de la ville, ainsi que du côté de la campagne, par un mur en pierre de taille. Le mur extérieur devoit avoir environ vingt-cinq pieds d’élévation ; celui de l’intérieur surpassoit le rempart en hauteur d’environ huit pieds. L’un et l’autre sont construits de l’espèce de lave qu’on appelle piperino, à l’exception de quatre ou cinq premières assises du mur extérieur, qui sont en pierre de roche ou travertin grossier. Toutes les pierres en sont parfaitement bien jointes : le mortier est en effet peu nécessaire dans les constructions faites avec des matériaux d’un grand échantillon. Ce mur extérieur est partout plus ou moins incliné vers le rempart ; les premières assises sont, au contraire, en retraite l’une sur l’autre.

« Quelques-unes des pierres, surtout celles de ces premières assises, sont entaillées et encastrées l’une dans l’autre de manière à se maintenir mutuellement. Comme cette façon de construire remonte à une haute antiquité, et qu’elle semble avoir suivi les constructions pélasgiques ou cyclopéennes, dont elle conserve quelques traces, on peut conjecturer que la partie des murs de Pompéi bâtie ainsi, est un ouvrage des Osques, ou du moins des premières colonies grecques qui vinrent s’établir dans la Campanie.

« Les deux murs étoient crénelés de manière que vus du côté de la campagne ils présentoient l’apparence d’une double enceinte de remparts.

« Ces murailles sont dans un grand désordre, que l’on ne peut pas attribuer uniquement aux tremblements de terre qui précédèrent l’éruption de 79. Je pense, ajoute M. Mazois, que Pompéi a dû être démantelé plusieurs fois, comme le prouvent les brèches et les réparations qu’on y remarque. Il paroît même que ces fortifications n’étoient plus regardées depuis longtemps comme nécessaires, puisque du côté où étoit le port les habitations sont bâties sur les murs, que l’on a en plusieurs endroits abattus à cet effet.

« Ces murs sont surmontés de tours, qui ne paroissent pas d’une si haute antiquité : leur construction indique qu’elles sont du même temps que les réparations faites aux murailles ; elles sont de forme quadrangulaire, servent en même temps de poterne, et sont placées à des distances inégales les unes des autres.

« Il paroît que la ville n’avoit pas de fossés, au moins du côté où l’on a fouillé ; car les murs, en cet endroit, étoient assis sur un terrain escarpé. »

On voit que par leur genre de construction les remparts sont les monuments qui résisteront le mieux à l’action du temps. Malgré l’attention extrême avec laquelle on a cherché à conserver ceux qui ont été découverts, l’exposition à l’air, dont ils ont été préservés depuis si longtemps, les a endommagés. Les pluies d’hiver, extrêmement abondantes dans l’Europe méridionale, font pénétrer graduellement l’humidité entre les briques et leur revêtement. Il y croît des mousses, puis des plantes qui déjoignent les briques. Pour éviter la dégradation on a couvert les murs avec des tuiles, et placé des toits au-dessus des édifices.