Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/378

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perbes. Dans une des salles, j’ai particulièrement remarqué trois sièges en bronze, d’une forme tout à fait inconnue, et de la plus belle conservation. Sur l’un d’eux étoit placé le squelette d’une femme, dont les bras étoient couverts de bijoux, en outre des bracelets d’or, dont la forme étoit déjà connue ; j’ai détaché un collier qui est vraiment d’un travail miraculeux. Je vous assure que nos bijoutiers les plus experts ne pourroient rien faire de plus précieux ni d’un meilleur goût.

« Il est difficile de peindre le charme que l’on éprouve à toucher ces objets sur les lieux mêmes où ils ont reposé tant de siècles, et avant que le prestige ne soit tout à fait détruit. Une des croisées étoit couverte de très-belles vitres, que l’on vient de faire remettre au musée de Naples.

« Tous les bijoux ont été portés chez le roi. Sous peu de jours ils seront l’objet d’une exposition publique.

« Pompéi a passé vingt siècles dans les entrailles de la terre ; les nations ont passé sur son sol ; ses monuments sont restés debout, et tous ses ornements intacts. Un contemporain d’Auguste, s’il revenoit, pourroit dire : « Salut, ô ma patrie ! ma demeure est la seule sur la terre qui ait conservé sa forme, et jusqu’aux moindres objets de mes affections. Voici ma couche ; voici mes auteurs favoris. Mes peintures sont encore aussi fraîches qu’au jour où un artiste ingénieux en orna ma demeure. Parcourons la ville, allons au théâtre ; je reconnois la place où pour la première fois j’applaudis aux belles scènes de Térence et d’Euripide.

« Rome n’est qu’un vaste musée ; Pompéi est une antiquité vivante. »

fin de la lettre.