Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/44

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Mackensie, vit la mer Arctique, revint hiverner sur le lac de l’Ours, et redescendit le Mackensie en 1826. À l’embouchure de ce fleuve l’expédition angloise se partagea : une moitié, pourvue de deux canots, alla retrouver à l’est la rivière de la Mine de Cuivre ; l’autre, sous les ordres de Francklin lui-même, et pareillement munie de deux canots, se dirigea vers l’ouest.

Le 9 juillet, le capitaine fut arrêté par les glaces : le 4 août il recommença à naviguer. Il ne pouvoit guère avancer plus d’un mille par jour ; la côte étoit si plate, l’eau si peu profonde, qu’on put rarement descendre à terre. Des brumes épaisses et des coups de vent mettoient de nouveaux obstacles aux progrès de l’expédition.

Elle arriva cependant le 18 août au 150e méridien et au 70e degré 30 minutes nord. Le capitaine Francklin avoit ainsi parcouru plus de la moitié de la distance qui sépare l’embouchure du Mackenzie du cap de Glace, au-dessus du détroit de Behring : l’intrépide voyageur ne manquoit point de vivres, ses canots n’avoient souffert aucune avarie ; les matelots jouissoient d’une bonne santé ; la mer était ouverte ; mais les instructions de l’amirauté étoient précises ; elles défendoient au capitaine de prolonger ses recherches s’il ne pouvoit atteindre la baie de Kotzebue avant le commencement de la mauvaise saison. Il fut donc obligé de revenir à la rivière de Mackensie, et le 21 septembre il rentra dans le lac de l’Ours, où il retrouva l’autre partie de l’expédition.

Celle-ci avoit achevé son exploration des rivages, depuis l’embouchure du Mackensie jusqu’à celle de la rivière de la Mine de Cuivre ; elle avoit même prolongé sa navigation jusqu’au golfe du Couronnement de Georges IV, et remonté vers l’est jusqu’au 118e méridien : partout s’étoient présentés de bons ports et une côte plus abordable que la côte relevée par le capitaine Francklin.

Le capitaine russe Otto Kotzebue découvrit en 1816, au nord-est du détroit de Behring, une passe ou entrée qui porte aujourd’hui son nom ; c’est dans cette passe que le capitaine anglois Beechey étoit allé sur une frégate attendre, au nord-est de l’Amérique, le capitaine Francklin, qui venoit vers lui du nord-ouest. La navigation du capitaine Beechey s’étoit heureusement accomplie : arrivé en 1826 au lieu et au temps du rendez-vous, les glaces n’avoient arrêté son grand vaisseau qu’au 72e degré 30 minutes de latitude nord. Obligé alors d’ancrer sous une côte, il remarquoit tous les jours des baïdars (nom russe des embarcations indiennes dans ces parages) qui passoient et repassoient par des ouvertures entre la glace et la terre ; il croyoit voir à chaque instant arriver ainsi le capitaine Francklin.