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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes - Génie du christianisme, 1828.djvu/350

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ou sublimes, ou gracieuses, ou tristes, ou charmantes ! Voyez le tableau de la Fronde : " La monarchie ébranlée jusqu’aux fondements, la guerre civile, la guerre étrangère, le feu au dedans et au dehors… Etaient-ce là de ces tempêtes par où le ciel a besoin de se décharger quelquefois ?… Ou bien était-ce comme un travail de la France, prête à enfanter le règne miraculeux de Louis[1] ? " Viennent des réflexions sur l’illusion des amitiés de la terre, qui " s’en vont avec les années et les intérêts, " et sur l’obscurité du cœur de l’homme, " qui ne sait jamais ce qu’il voudra, qui souvent ne sait pas bien ce qu’il veut, et qui n’est pas moins caché ni moins trompeur à lui-même qu’aux autres[2]. "

Mais la trompette sonne, et Gustave paraît : " Il paraît à la Pologne surprise et trahie, comme un lion qui tient sa proie dans ses ongles, tout prêt à la mettre en pièces. Qu’est devenue cette redoutable cavalerie qu’on voit fondre sur l’ennemi avec la vitesse d’un aigle ? Où sont ces armes guerrières, ces marteaux d’armes tant vantés et ces arcs qu’on ne vit jamais tendus en vain ? Ni les chevaux ne sont vites, ni les hommes ne sont adroits que pour fuir devant le vainqueur[3]. "

Je passe, et mon oreille retentit de la voix d’un prophète. Est-ce Isaïe, est-ce Jérémie qui apostrophe l’île de la Conférence et les pompes nuptiales de Louis ?

" Fêtes sacrées, mariage fortuné, voile nuptial, bénédiction, sacrifice, puis-je mêler aujourd’hui vos cérémonies, vos pompes avec ces pompes funèbres, et le comble des grandeurs avec leurs ruines[4] ? "

Le poète (on nous pardonnera de donner à Bossuet un titre qui fait la gloire de David), le poète continue de se faire entendre ; il ne touche plus la corde inspirée, mais, baissant sa lyre d’un ton jusqu’à ce mode dont Salomon se servit pour chanter les troupeaux du mont Galaad, il soupire ces paroles paisibles : " Dans la solitude de Sainte-Fare, autant éloignée des voix du siècle que sa bienheureuse situation la sépare de tout commerce du monde ; dans cette sainte montagne, que Dieu avait choisie depuis mille ans, où les épouses de Jésus-Christ faisaient revivre la beauté des anciens jours ; où les joies de la terre étaient inconnues ; où les vestiges des hommes du monde, des curieux et des vagabonds ne paraissaient pas ; sous la conduite de la sainte abbesse, qui savait donner le lait aux enfants aussi bien que le pain aux forts, les commencements de la princesse Anne étaient heureux[5]. "

  1. Orais. fun. d’Anne de Gonz. (N.d.A.)
  2. Orais. fun. d’Anne de Gonz. (N.d.A.)
  3. Orais. fun. d’Anne de Gonz. (N.d.A.)
  4. Orais. fun. de Marie-Thér. d’Autr.(N.d.A)
  5. Orais. fun. d’Anne de Gonz. (N.d.A.)