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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes - Génie du christianisme, 1828.djvu/409

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Cependant, en errant un jour dans un cimetière de campagne, nous aperçûmes une épitaphe latine sur une pierre qui annonçait le tombeau d’un enfant. Surpris de cette magnificence, nous nous en approchâmes, pour connaître l’érudition du curé du village ; nous lûmes ces mots de l’Evangile ;

Sinite parvulos vedire ad me.

Laissez les petits enfants venir à moi.

Les cimetières de la Suisse sont quelquefois placés sur des rochers [NOTE 31], d’où ils commandent les lacs, les précipices et les vallées. Le chamois et l’aigle y fixent leur demeure, et la mort croît sur ces sites escarpés, comme ces plantes alpines dont la racine est plongée dans des glaces éternelles. Après son trépas, le paysan de Glaris ou de Saint-Gall est transporté sur ces hauts lieux par son pasteur. Le convoi a pour pompe funèbre la pompe de la nature et pour musique sur les croupes des Alpes ces airs bucoliques qui rappellent au Suisse exilé son père, sa mère, ses sœurs et les bêlements des troupeaux de sa montagne.

L’Italie présente au voyageur ses catacombes, ou l’humble monument d’un martyr dans les jardins de Mécène et de Lucullus. L’Angleterre a ses morts vêtus de laine, et ses tombeaux semés de réséda. Dans ces cimetières d’Albion, nos yeux attendris ont quelquefois rencontré un nom français au milieu des épitaphes étrangères : revenons aux tombeaux de la patrie.


Chapitre VIII - Tombeaux dans les Églises

Rappelez-vous un moment les vieux monastères ou les cathédrales gothiques telles qu’elles existaient autrefois ; parcourez ces ailes du chœur, ces chapelles, ces nefs, ces cloîtres pavés par la mort, ces sanctuaires remplis de sépulcres. Dans ce labyrinthe de tombeaux, quels sont ceux qui vous frappent davantage ? Sont-ce ces monuments modernes, chargés de figures allégoriques, qui écrasent de leurs marbres glacés des cendres moins glacées qu’elles ? Vains simulacres qui semblent partager la double léthargie du cercueil où il sont assis et des cœurs mondains qui les ont fait élever ! A peine y jetez-vous un