Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t1.djvu/73

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.
9
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

liers et les examinateurs de mes preuves trouvaient-ils aussi que je méritais à plus d’un titre la grâce que je sollicitais, etc., moi qui n’étais qu’un chétif sous-lieutenant d’infanterie, inconnu, sans crédit, sans faveur et sans fortune ?

Le fils aîné de mon frère (j’ajoute ceci en 1831 à mon texte primitif écrit en 1811), le comte Louis de Chateaubriand[1], a épousé mademoiselle d’Orglandes, dont il a eu cinq filles et un garçon, celui-ci nommé Geoffroy. Christian, frère cadet de Louis, arrière-petit-fils et filleul de M. de Malesherbes, et lui ressemblant d’une manière frappante, servit avec distinction en Espagne comme capitaine dans les dragons de la garde, en 1823. Il s’est fait jésuite à Rome. Les jésuites suppléent à la solitude à mesure que celle-ci s’efface de la terre. Christian vient de mourir à Chieri, près Turin : vieux et malade, je le devais devancer ; mais ses vertus l’appelaient au ciel avant moi, qui ai encore bien des fautes à pleurer.

Dans la division du patrimoine de la famille, Christian avait eu la terre de Malesherbes, et Louis la terre de Combourg. Christian, ne regardant pas le partage égal comme légitime, voulut, en quittant le monde, se dépouiller des biens qui ne lui appartenaient pas et les rendre à son frère aîné.

À la vue de mes parchemins, il ne tiendrait qu’à moi, si j’héritais de l’infatuation de mon père et de mon frère, de me croire cadet des ducs de Bretagne, venant de Thiern, petit-fils d’Alain III.

Cesdits Chateaubriand auraient mêlé deux fois leur

  1. Sur le comte Louis de Chateaubriand et sur son frère Christian, voir l’Appendice, No III.