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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

dire qu’il était allé en Russie : il n’en convint pas tout à fait, mais il avoua avec modestie qu’il avait passé quelques mois à Saint-Pétersbourg[1].

M. de La Maisonfort[2], homme d’esprit qui se cachait, eut recours à moi, et bientôt M. Bertin l’aîné,

  1. L’abbé Guillon (1760-1847). Il avait été aumônier, lecteur et bibliothécaire de la princesse de Lamballe. Le cardinal Fesch, l’avait emmené avec lui à Rome. Appelé à la Faculté de théologie dès sa création, il y fit avec distinction le cours d’éloquence sacrée pendant trente ans, et en devint le doyen. Promu par Louis-Philippe, en 1831, à l’évêché de Beauvais, il ne put obtenir ses bulles du pape, parce qu’il avait administré l’abbé Grégoire, évêque constitutionnel de Blois, sans avoir observé toutes les règles ecclésiastiques ; néanmoins, ayant reconnu ses torts, il fut nommé, en 1832, évêque in partibus du Maroc. On lui doit une traduction complète des Œuvres de saint-Cyprien, et une Bibliothèque choisie des Pères grecs et latins, traduits en français, 26 vol. en in-8o.
  2. Antoine-François-Philippe Dubois-Descours, marquis de La Maisonfort (1778-1827). Il était, au moment de la Révolution, sous-lieutenant dans les gardes du corps, à la compagnie de Gramont. Il émigra et fit la campagne de 1792, à l’armée des princes. Rentré en France au début du Consulat, il fut arrêté et interné à l’île d’Elbe, d’où il s’échappa et vint à Rome. C’est alors que le vit Chateaubriand. Il put gagner la Russie et ne revit la France qu’en 1814. Député du Nord, de 1815 à 1816, il fut, après la session, chargé de la direction du domaine extraordinaire de la couronne. Devenu plus tard ministre plénipotentiaire à Florence, il eut la bonne fortune d’y voir arriver, comme secrétaire de la légation, Alphonse de Lamartine. Le marquis de la Maisonfort a publié un grand nombre d’écrits politiques, notamment le Tableau politique de l’Europe depuis la bataille de Leipzig jusqu’au 13 mars 1814. Il devra de vivre à cette double chance d’avoir eu son nom inscrit dans les Mémoires de Chateaubriand et dans les Méditations de Lamartine, qui lui a dédié sa pièce intitulée : Philosophie.

    Toi qui longtemps battu des vents et de l’orage,
    Jouissant aujourd’hui de ce ciel sans nuage,
    Du sein de ton repos contemples du même œil
    Nos revers sans dédain, nos erreurs sans orgueil…