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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

térans, lui passent sur le ventre ; ils sauvent Bonaparte et prennent position derrière le Rhin. Arrivé en fugitif à Mayence, Napoléon se retrouve à Saint-Cloud le 9 novembre ; l’infatigable de Lacépède revient lui dire : « Votre Majesté a tout surmonté. » M. de Lacépède avait parlé convenablement des ovipares[1] ; mais il ne se pouvait tenir debout.

La Hollande reprend son indépendance et rappelle le prince d’Orange[2]. Le 1er  décembre les puissances alliées déclarent « qu’elles ne font point la guerre à la France, mais à l’empereur seul, ou plutôt à cette prépondérance qu’il a trop longtemps exercée, hors des limites de son empire, pour le malheur de l’Europe et de la France[3]. »

Quand on voit s’approcher le moment où nous allions être renfermés dans notre ancien territoire, on se demande à quoi donc avaient servi le bouleversement de l’Europe et le massacre de tant de millions d’hommes ? Le temps nous engloutit et continue tranquillement son cours.

Par le traité de Valencay du 11 décembre, le misérable Ferdinand VII est renvoyé à Madrid : ainsi se termina obscurément à la hâte cette criminelle entreprise d’Espagne, première cause de la perte de Napoléon. On peut toujours aller au mal, on peut toujours

  1. Lacépède avait publié en 1788 l’Histoire générale et particulière des quadrupèdes ovipares.
  2. Le 24 novembre 1813, le gouvernement provisoire établi à Amsterdam à la suite du soulèvement de cette ville (16 novembre), proclama l’indépendance des Provinces-Unies, et rappela le prince d’Orange.
  3. Déclaration de Francfort, signée dans cette ville par les souverains alliés. Elle est datée du 1er  décembre 1813, mais elle ne parut que dans la Gazette de Francfort du 7.