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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE


IV

le discours de réception à l’académie[1].


Marie-Joseph Chénier mourut le 10 janvier 1811. Sa mort laissait vacante une place à l’Institut, dans la seconde classe, affectée à la langue et à la littérature française. Il ne se pouvait guère que Chateaubriand songeât à le remplacer et qu’il posât sa candidature. Sans doute les plus grands écrivains avaient toujours tenu à honneur d’être membres de l’Académie française. Mais il convient ici de se rappeler qu’en 1811 l’Académie n’était pas ce qu’elle avait été avant 1789 et ce qu’elle est redevenue depuis 1816. La Convention avait supprimé l’Académie française le 8 août 1793. Lorsqu’elle avait créé l’Institut, le 25 octobre 1795, non seulement elle ne l’avait pas rétablie, mais elle s’était attachée à en abolir jusqu’aux derniers vestiges ; elle s’était appliquée à en rendre le retour impossible. Dans le nouvel Institut, la Littérature — c’est-à-dire ce qui avait été autrefois l’Académie française — était reléguée au dernier rang, dans ce qu’on appelait la « troisième classe ». Sur les huit sections dont se composait cette classe, on avait réservé aux lettres deux sections seulement, celles de Grammaire et de Poésie. Chacune de ces deux sections devait être composée de douze membres, dont six résidant à Paris et six résidant dans les départements. Vingt-quatre membres, dont douze obligatoirement pris parmi les grammairiens et les poètes de chefs-lieux de district, voilà ce qui restait des Quarante ! Il est vrai que, pour rehausser leur prestige, la Convention leur donnait pour confrères des comédiens et des chanteurs, la déclamation étant mise sur la même ligne que la poésie. Comme les poètes de département, les comédiens de province avaient droit, eux aussi,

  1. Ci-dessus, p. 33.