tion, les obliger à faire un sacrifice d’honneur et de principe, dont les esprits élevés et les consciences droites ne s’arrangent pas.
Vieux soldat discipliné, j’accourais donc pour m’aligner dans le rang et marcher sous mes capitaines : réduit par la volonté du pouvoir à un duel, je l’acceptai. Je ne m’attendais guère à venir, de la tombe du mari, combattre auprès de la prison de la veuve.
En supposant que je dusse rester seul, que j’eusse mal compris ce qui convient à la France, je n’en étais pas moins dans la voie de l’honneur. Or, il n’est pas inutile aux hommes qu’un homme s’immole à sa conscience ; il est bon que quelqu’un consente à se perdre pour demeurer ferme à des principes dont il a la conviction et qui tiennent à ce qu’il y a de noble dans notre nature : ces dupes sont les contradicteurs nécessaires du fait brutal, les victimes chargées de prononcer le veto de l’opprimé contre le triomphe de la force. On loue les Polonais ; leur dévouement est-il autre chose qu’un sacrifice ? il n’a rien sauvé ; il ne pouvait rien sauver : dans les idées mêmes de mes adversaires, le dévouement sera-t-il stérile pour la race humaine ?
Je préfère, dit-on, une famille à ma patrie : non, je préfère au parjure la fidélité à mes serments, le monde moral à la société matérielle ; voilà tout : pour ce qui est de la famille, je ne m’y consacre que dans la persuasion qu’elle était essentiellement utile à la France ; je confonds sa postérité avec celle de la patrie, et lorsque je déplore les malheurs de l’une, je