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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

cette inscription : À Chateaubriand les Villeneuvois fidèles (Lot-et-Garonne).[1] Une ville du Midi m’a envoyé de très bon vin pour remplir cette coupe, mais je ne bois pas. Enfin, la France légitimiste a pris pour devise ces mots : Madame, votre fils est mon roi ! et plusieurs journaux les ont adoptés pour épigraphe ; on les a gravés sur des colliers et sur des bagues. Je serai le premier à avoir dit en face de l’usurpation une vérité que personne n’osait dire, et, chose étrange ! je crois moins au retour de Henri V que le plus misérable juste-milieu ou le plus violent républicain.

Au reste, je n’entends pas le mot usurpation dans le sens étroit que lui donne le parti royaliste ; il y aurait beaucoup de choses à dire sur ce mot, comme sur celui de légitimité : mais il y a véritablement usurpation, et usurpation de la pire espèce, dans le tuteur qui dépouille le pupille et proscrit l’orphelin. Toutes ces grandes phrases « qu’il fallait sauver la patrie » sont des prétextes que fournit à l’ambition une politique immorale. Vraiment, ne faudrait-il pas

  1. Il s’agit ici des royalistes de Villeneuve-d’Agen. Chateaubriand les remercia en ces termes :
    « Paris, 17 avril 1833.
    « Messieurs,

    « La belle coupe que vous voulez bien m’offrir en votre nom et en celui de vos compatriotes sera religieusement conservée par moi, comme un témoignage de votre estime et des sentiments qui nous unissent. Puisse, Messieurs, venir le jour où je boirai à la santé du fils de Henri IV dans cette coupe de la fidélité. Qu’il me soit permis d’offrir en particulier mes remerciements et mes hommages aux dames dont je lis la signature au bas de votre touchante lettre.

    « J’ai l’honneur d’être, avec une vive reconnaissance, etc…

    « Chateaubriand »