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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

sauter de 1806, dont le souvenir venait de m’occuper, à 1833, là où je me trouvais en réalité : Marco Polo tomba de la Chine à Venise, précisément après une absence de vingt-sept ans.

Madame de Bauffremont porte à merveille sur son visage et dans ses manières le nom de Montmorency : elle aurait pu très bien, comme cette Charlotte, mère du grand Condé et de la duchesse de Longueville, être aimée de Henri IV. La princesse m’apprit que madame la duchesse de Berry m’avait écrit de Pise une lettre que je n’avais pas reçue : Son Altesse Royale arrivait à Ferrare où elle m’espérait.

Il m’en coûtait d’abandonner ma retraite ; une huitaine était encore nécessaire à ma revue ; je regrettais surtout de ne pouvoir mettre à fin l’aventure de Zanze ;[1] mais mon temps appartenait à la mère de Henri V, et toujours, quand je suis une route, vient un heurt qui me jette dans un autre chemin.

Je partis laissant mes bagages à l’hôtel de l’Europe, comptant revenir avec Madame.

Je retrouvai ma calèche à Fusina : on la tira d’une vieille remise, comme un joyau du garde-meuble de la couronne. Je quittai la rive qui prend peut-être son nom de la fourche à trois dents du roi de la mer : Fuscina.

    non comme une faveur, mais comme un droit, le titre de duc de Montmorency. L’un des enfants de la duchesse de Valençay, le comte Adalbert de Talleyrand-Périgord, sollicita, de son côté, comme faveur, l’honneur de relever le titre éteint par la mort de son oncle ; ce titre lui fut concédé par un décret impérial, du 14 mai 1864. — Voir, au tome iv des Plaidoyers de Berryer, l’Affaire de la famille de Montmorency contre M. Adalbert de Talleyrand-Périgord.

  1. Voyez, page 243 de ce volume, ce qui est dit de Zanze, et plus bas son manuscrit.