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LIVRE QUATRIÈME

vérité devant les yeux, et que j’essaye de discerner ce qui fait qu’on est si échauffé de certaines matières et que sur les autres on n’a que de l’indifférence et de la froideur, rien ne se présente plus naturellement sinon que ce qui donne le mouvement à la plupart des hommes, c’est l’intérêt que d’un côté il y a à plaire et à gagner, et que de l’autre il n’y a rien qu’à perdre (j’entends de ceux qui sont théologiens et qui ne peuvent ignorer le fond et les conséquences des choses) ; et comme je n’ai rien à perdre ni à gagner en ce monde, et que j’ai réduit à l’éternité toute seule mes prétentions et mes espérances, ce sont des tempéraments et des retenues que je ne puis goûter ni comprendre. En vérité, si Dieu n’a pitié du monde et s’il n’empêche l’effet de l’application avec laquelle on travaille à détruire les maximes véritables pour en substituer d’autres en leur place, qui ne le sont pas, les maux se multiplieront, et l’on verra dans peu une désolation presque générale. »

Je n’ai point abrégé cette lettre, trop longue pour nous ; elle décide une question si vivante alors, maintenant si morte. Le jansénisme par son