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VIE DE RANCÉ

Les solitaires écrivirent en même temps au pape :

« Il y a plusieurs années, très saint père, que nous jouissons d’un grand et précieux trésor dans la personne de notre père abbé ; mais il va nous être enlevé si Votre Sainteté ne se hâte de nous secourir. Il va à la mort avec joie ; il ne veut rien prendre de ce qui pourrait réparer ses forces ; il chante avec l’apôtre : Si la maison de terre que nous habitons vient à se dissoudre, Dieu nous donnera dans le ciel une demeure qui durera éternellement. Qu’il nous survive, qu’il nous ferme les yeux ! » Le cardinal Cibo répondit au nom du pape que sa sainteté ordonnait que l’abbé de la Trappe eût à suspendre des austérités qui compromettaient sa vie.

Le 2 de novembre de l’année 1694, Rancé mandait à l’abbé Nicaise : « Voilà M. Arnauld mort après avoir poussé sa carrière aussi loin qu’il l’a pu. Il a fallu qu’elle se soit terminée ; voilà bien des questions finies. L’érudition de M. Arnauld et son autorité étaient d’un grand poids pour le parti heureux qui n’en a point d’autre que celui de Jésus-Christ ; qui, mettant à part tout ce qui pourrait l’en séparer ou l’en distraire, même pour un moment, s’y attache avec tant de fer-