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VIE DE RANCÉ

portent que des songes. On se plaît mélancoliquement à voir dans quel cercle roulaient les idées dernières de madame de Sévigné : on ne dit pas quelle fut sa parole fatidique. On aimerait à avoir un recueil des derniers mots prononcés par les personnes célèbres ; ils feraient le vocabulaire de cette région énigmatique des sphinx par qui en Égypte l’on communique du monde au désert.

À Rome qu’avait habitée madame des Ursins, alliée de madame de Rambouillet, madame des Ursins ne se pouvait résoudre à retourner proscrite et vieille : « Occupée du monde, dit Saint-Simon, de ce qu’elle avait été et de ce qu’elle n’était plus, elle eut le plaisir de voir madame de Maintenon, oubliée, s’anéantir dans Saint-Cyr. »

Et pourtant M. le duc de Noailles vient de faire de Saint-Cyr une restauration admirable. En nous parlant du plaisir que devait trouver madame des Ursins à prolonger ses jours parmi des ruines, Saint-Simon regardait apparemment comme plaisir la plus dure des afflictions, le survivre. Heureux l’homme expiré en ouvrant les yeux ! il meurt aux bras de ces femmes du berceau, qui ne sont dans le monde qu’un sourire.

Des débris de cette société se forma une multi-