Page:Chateaubriand - Voyage en Italie, édition 1921.djvu/135

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En parcourant cette cité des morts, une idée me poursuivait. À mesure que l’on déchausse quelque édifice à Pompeïa, on enlève ce que donne la fouille, ustensiles de ménage, instruments de divers métiers, meubles, statues, manuscrits, etc., et l’on entasse le tout au Musée Portici. Il y aurait selon moi quelque chose de mieux à faire : ce serait de laisser les choses dans l’endroit où on les trouve et comme on les trouve, de remettre des toits, des plafonds, des planchers et des fenêtres, pour empêcher la dégradation des peintures et des murs ; de relever l’ancienne enceinte de la ville, d’en clore les portes ; enfin d’y établir une garde de soldats avec quelques savants versés dans les arts. Ne serait-ce pas là le plus merveilleux musée de la terre ? Une ville romaine conservée tout entière, comme si ses habitants venaient d’en sortir un quart d’heure auparavant !

On apprendrait mieux l’histoire domestique du peuple romain, l’état de la civilisation romaine dans quelques promenades à Pompeïa restaurée, que par la lecture de tous les ouvrages de l’antiquité. L’Europe entière accourrait : les frais qu’exigerait la mise en œuvre de ce plan seraient amplement compensés par l’affluence des étrangers à Naples. D’ailleurs rien n’obligerait d’exécuter ce travail à la fois ; on continuerait lentement, mais régulièrement les fouilles ; il ne faudrait qu’un peu de brique, d’ardoise, de