Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/551

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De Avaricia.

Avarice, d’après saint Augustin, est concupiscence du cœur pour les biens de la terre. Il faut distinguer Avarice et Convoitise, « Convoitise c’est convoiter ce que tu n’as pas, Avarice c’est garder ce que tu as, sans en avoir besoin ». « Quelle différence y a-t-il entre un idolâtre et un avare fors que l’idolâtre par aventure n’a qu’une idole ou deux, et l’avare en a plusieurs ? Car tous les florins de son coffre sont des idoles pour lui. » De convoitise vient rapine des seigneurs, lesquels prétendent que c’est justice d’écorcher leurs pauvres hommes par tailles et coutumes excessives, disant que le serf n’a aucun bien temporel qui n’appartienne à son seigneur. Or le servage n’est point prescrit par la nature, il est seulement la punition d’une faute. « Les seigneurs ne se doivent mie glorifier de leurs seigneuries puisque dans leur condition naturelle ils ne sont pas seigneurs de serfs. Pensez que de cette semence dont serfs sont nés, sont aussi nés seigneurs. Serf peut être sauvé aussi bien que seigneur. La même mort qui prend esclave, prend seigneur. Adonc je dis : agis avec ton serf comme voudrais que ton seigneur fit avec toi, si tu étais dans telle triste condition. Tout pécheur est serf envers péché. » Que dire de ceux qui dépouillent et pillent l’Église ? L’épée donnée au chevalier signifie qu’il doit défendre la Sainte Église, non la voler, et celui qui ainsi fait, est traître envers Christ. Puis vient Losengerie (flatterie, duperie) entre marchands, car commerce est de deux façons, l’un est honnête, enjoint par Dieu, l’autre fait de parjures et mensonges. Simonie est « commerce spirituel deshonnête, c’est-à-dire désir d’acquérir ce qui concerne le sanctuaire de Dieu et la cure des âmes. Par Simonie les voleurs sont introduits dans l’Église pour voler les âmes de Jésus-Christ et détruire son patrimoine. C’est chasser l’élu de Dieu et mettre à sa place l’enfant du Diable. » Puis viennent le jeu, les faux témoignages qui permettent de dépouiller autrui, le vol spirituel ou sacrilège.

Miséricorde et pitié sont les remèdes d’Avarice. Il faut imiter Notre Seigneur qui nous fit don de sa personne. Un autre remède est dépense raisonnable, et ici, il faut rendre grâces pour les biens qu’on possède et se souvenir qu’on ne sait ni quand ni comment l’on mourra, et en donnant, se garder de la prodigalité. « Qui dépense mal à propos, il est comme un cheval qui cherche à boire de l’eau troublée au lieu de boire l’eau de la claire fontaine. »

De Gula.

Gloutonnerie est un appétit démesuré pour manger et boire. C’est le péché qui a corrompu le monde comme on le voit au péché d’Adam et d’Ève. Celui qui y succombe ne peut résister à nul autre. Ce péché est de plusieurs sortes : Ivrognerie est la sépulture de la raison humaine ; quand un homme est ivre, il perd la raison et c’est péché mortel ; pourtant si un homme n’est pas habitué aux boissons fortes ou ne connaît pas la force de la boisson, ou a trop peiné, et se laisse surprendre par la boisson, le péché est véniel. « Ivrognerie cause dérangement d’esprit et perte de mémoire. Excès de viandes amène corruption des humeurs corporelles. » Saint Grégoire distingue autrement les branches de ce péché :